Taïwan a longtemps eu une grande variété de produits agricoles, comme le riz, les patates douces et la canne à sucre, utilisés non seulement pour l’alimentation, mais aussi pour la fabrication de boissons alcoolisées. Avant l’avènement des techniques modernes de fermentation et de distillation, les gens utilisaient le matériel disponible pour produire des boissons alcoolisées à partir d’ingrédients bruts et d’eau. C’était le début de la production locale d’alcool à Taïwan.
Même si par le passé la production privée de boissons alcoolisées était interdite à Taïwan, mais que malgré cela, les gens qui avaient un surplus de patates douces où autres produits agricoles, fabriquaient quand même leur propre liqueur, qu’ils offraient à la famille pour des occasions spéciales.
L’alcool de patate douce fait maison
Au Japon, Luo, fondateur de la distillerie Heng Chi, a découvert l’alcool de patate douce pour la première fois. Il s’est demandé pourquoi Taïwan ne produirait pas cet alcool. Inspiré, il a décidé d’ouvrir une distillerie à Taïwan pour en fabriquer. Évoluant dans le domaine des machines industrielles, Luo a d’abord cherché des ouvrages et des renseignements pour comprendre les principes de la distillation des liqueurs. Puis, par l’expérimentation pratique, il a progressivement mis en place son processus de distillation de l’alcool de patate douce.
À la distillerie Heng Chi, à Taoyuan, l’air est empreint du parfum délicat des patates douces grillées. Luo nous guide à travers le processus de brassage et de distillation de l’alcool de patate douce. Il nous précise que les patates douces doivent être cuites à la vapeur avant la fermentation. Pour cela, Heng Chi se procure les patates douces Tainung n° 57 « rejetées » qui ne correspondent pas aux critères de taille ou d’apparence du marché et ne peuvent donc pas être vendues à un bon prix.
Aux agriculteurs, j’ai dit : « Vendez les bonnes et je vais acheter les mauvaises ». Luo a passé beaucoup de temps dans les zones de production, à la fois pour convaincre les agriculteurs de lui confier leurs patates douces et pour garantir la sécurité environnementale des exploitations. En récupérant les patates douces qui ne répondent pas aux spécifications du commerce de détail, Heng Chi aide les agriculteurs à obtenir un revenu supplémentaire tout en réduisant le gaspillage alimentaire.
Après la transformation, des cycles répétés de distillation permettent d’extraire l’essence de la saveur de la masse dense de patates douces. Luo nous propose de déguster un peu d’alcool de patate douce. La liqueur semble limpide, et le bouquet est complexe et nuancé. En prenant une gorgée, on ressent en premier lieu la douceur puissante propre aux patates douces, suivie immédiatement d’une sensation de fraîcheur.
Tandis que le spiritueux glisse dans nos gorges, Luo raconte comment il a fait la connaissance d’une personne très importante. Pendant la pandémie de Covid-19, Heng Chi a eu l’idée de commercialiser un produit dont l’emballage serait orné de peintures de dieux des portes, afin de symboliser la protection du bien-être de la population. Leur recherche d’un artiste avec lequel travailler les a finalement menés à Hung Ping-shun, peintre du temple de Shuntian, dans la région de Fanshu, dans le canton de Shuilin, dans le comté de Yunlin.
Après plusieurs rencontres en personne et des conversations sincères, Hung a enfin accepté de prêter les images des dieux de la porte qu’il avait peintes. Les produits affichent en extérieur un dieu de la porte d’un temple, approuvant la vente de ces paquets-cadeaux d’esprit de patate douce. Cela a créé des remous sur le marché et a attiré l’attention du public sur Hung, nommé trésor national vivant par le ministère de la culture. Par coïncidence, Shuilin est également un important centre de production de patates douces Tainung n° 57.
Les liens entre la zone de production, la liqueur et l’artiste ont suscité de nombreuses possibilités en termes de marketing. Kinou Luo affirme : « Mon objectif est que davantage de personnes découvrent ce talentueux artiste ». Il ne veut pas imposer directement son produit aux consommateurs, mais préfère garder la marque discrète. Il est plus important que les clients soient d’abord attirés par le parfum de l’alcool et qu’ils comprennent personnellement l’histoire derrière le produit. De la même manière que le président d’entreprise septuagénaire a redécouvert la saveur de l’alcool distillé par son grand-père grâce à la liqueur de patate douce de Heng Chi, Luo espère que plus de Taïwanais se rappelleront de leur ville natale grâce au parfum de l’eau-de-vie de patate douce.
Des possibilités illimitées pour le vin de riz
L’alcool de riz est très apprécié à Taïwan depuis longtemps et occupe une place essentielle dans la cuisine familiale préparée par les mères de famille de l’île. Dans le canton de Sanxing, situé dans le comté de Yilan, ce produit de base est fourni par la Yudo Distillery and Winery Company. Il est fréquent d’apercevoir les habitants se rendre en scooter à la cave pour acheter des boissons alcoolisées. Ma He-tseng, le fondateur, affirme avec un sourire : « Tout le monde vient, apporte son argent, effectue ses achats et repart avec. Nous sommes comme un grand magasin général. »
La majorité des visiteurs qui viennent à l’établissement sont généralement impressionnés en premier lieu par l’armoire à vin médicinal en forme de nid d’abeille et par les machines de rizerie vieilles de 50 ans présentes dans le hall d’entrée de la cave. Cependant, c’est la salle de dégustation adjacente, entourée d’armoires renfermant des boissons alcoolisées, qui représente l’atout majeur de Yudo.
Ma He-tseng dispose sept bouteilles sur la table : amazake (saké sucré) sans alcool, champagne de riz, saké ginjo, vin de riz, vin de prune, vin de thé et vin de café. Cette disposition correspond aux étapes de la fabrication de chaque boisson et reflète l’expertise acquise par Yudo au cours des 20 dernières années.
À cette époque, Ma avait terminé son service militaire et avait déménagé en Chine pour travailler dans une société de biotechnologie taïwanaise. Peu de temps après, il est retourné à Taïwan pour participer à un projet de recherche visant à cultiver la moisissure koji (Aspergillus oryzae) afin de produire du saké.
Bien que Ma ne comprenne pas comment le saké est fabriqué, il a utilisé son esprit pratique acquis dans l’armée pour réussir à produire le premier saké de Yudo. Cependant, étant donné que le marché ne connaissait pas beaucoup le saké à l’époque, les ventes n’ont pas décollé. Pour maintenir l’entreprise à flot, sa seule solution était de distiller le saké en vin de riz, qu’il a appelé d’après l’expression taïwanaise qui signifie « pas d’alternative ».
Yudo a arrêté de produire du saké. Ma prend une pause et sort discrètement une bouteille en verre sans étiquette. Il verse ensuite un liquide transparent dans un verre et nous demande de deviner à quelle bouteille de boisson sur la table il correspond.
La liqueur transparente est parfumée et douce en bouche, mais nous ne parvenons pas à identifier l’ingrédient qui lui confère sa saveur. Mon ami affirme qu’il s’agit d’un vin de riz. Il explique que comme l’alcool de riz de Yudo a un goût distinct de celui généralement vendu sur le marché, de nombreux visiteurs risquent de penser qu’il s’agit d’une autre boisson, à moins d’être prévenus à l’avance. Grâce à ce type de comparaison, il espère changer les idées reçues sur le vin de riz.
La production de vin de riz a marqué un tournant pour Yudo. À mesure que la réputation de l’entreprise en matière de production de vins de qualité s’est répandue, non seulement les résidents locaux sont devenus des clients de longue date, mais de nombreux agriculteurs se sont également manifestés dans l’espoir de transformer leurs excédents de riz paddy en vin.
Mais Ma avait des projets à plus long terme. En plus de produire du vin de riz pour ces agriculteurs, il a également essayé de les aider à entreprendre une culture planifiée et à reprendre la culture des variétés de riz du passé.
Yudo a continué à produire des vins de prune, de thé et de café, qui ne représentent qu’une fraction des nouvelles possibilités imaginées pour les vins de riz. En plaisantant, Ma a déclaré : « Je ne peux pas vous parler de tous nos vins de riz : il faudrait trois jours et trois nuits pour vous présenter chacun d’eux. Chaque vin est le fruit de l’engagement total des maîtres vignerons, ainsi que du travail acharné des agriculteurs qui ont cultivé le riz et les fruits utilisés dans leur composition, avec leur sueur et leurs larmes. »
Retrouver le goût idéal de la canne à sucre
La canne à sucre a été apportée à Taïwan pendant la période de la colonisation hollandaise (1624-1668). En raison du climat chaud et humide de l’île, sa culture s’est largement développée. Ainsi, elle est devenue une ressource privilégiée par la population pour la fabrication de boissons alcoolisées, se classant en troisième position après le riz et les patates douces.
Après l’instauration de restrictions légales sur la production d’alcool par les particuliers dans les années 1920, qui ont duré jusqu’à l’entrée de Taïwan dans l’Organisation mondiale du commerce en 2002, et le déclin de l’industrie sucrière à partir des années 1960, l’utilisation de la canne à sucre pour fabriquer des boissons alcoolisées a progressivement disparu.
Aujourd’hui, la raffinerie Huwei de la Taiwan Sugar Corporation demeure l’une des deux rares unités de traitement du sucre encore en fonction à Taïwan. Chaque année, lors de la récolte, on peut admirer le spectacle fascinant des trains transportant la canne à sucre sur des voies étroites croisant les trains de la Taiwan Railway Administration, pendant que l’arôme sucré de la canne fraîchement coupée embaume l’air.
« C’est le parfum que j’affectionnais dans mon enfance », affirme Cliff Cheng, le fondateur de la distillerie Favorland, et c’est cette saveur qu’il souhaite retrouver dans le rhum qu’il fabrique. En visitant la distillerie Huwei de Favorland, nous accompagnons Cliff Cheng pour découvrir le processus de fabrication bien établi du rhum, depuis la transformation des ingrédients bruts jusqu’à la distillation et au vieillissement. Cependant, les premières tentatives de distillation de rhum par Favorland ont été semées d’embûches.
En 2013, après avoir reçu une licence pour exploiter une distillerie, M. Cheng a choisi d’utiliser les cultures principales de Huwei, à savoir le riz paddy et la canne à sucre, comme ingrédients principaux pour fabriquer les boissons alcoolisées de Favorland. Bien que son whisky de riz ait été commercialisé en 2016, son rhum à base de jus de canne à sucre n’était toujours pas disponible.
M. Cheng explique que la saveur du rhum qu’il a distillé n’a jamais été à la hauteur de l’arôme qu’il avait perçu à la saison des récoltes. Contrairement à la méthode habituelle qui consiste à diluer de la mélasse de canne à sucre avec de l’eau, à la faire fermenter avec de la levure, puis à distiller plusieurs fois la liqueur obtenue, il n’a pas obtenu la saveur recherchée. Bien que ces rhums satisfassent les exigences du marché, ils n’ont tout simplement pas la saveur qu’il convoitait.
Le rhum agricole est fabriqué sur l’île française de la Martinique, dans les Caraïbes, à partir de jus de canne à sucre frais. M. Cheng a choisi d’adopter cette méthode. En modifiant le processus pour inclure du sucre de canne brut dans le jus, le rhum Favorland a été lancé sur le marché en 2020.
Le rhum Favorland a connu un succès immédiat dès sa mise sur le marché. Un sommelier français a partagé avec Cheng : « Le rhum Favorland est incontestablement le meilleur que j’ai jamais dégusté à Taïwan. » Il souligne cependant que la notion de bon ou mauvais goût est subjective. Tout comme tout le monde n’apprécie pas le tofu odorant, Favorland vise à se démarquer en proposant un style unique : il souhaite que son rhum évoque les souvenirs de la relation à long terme entre les habitants de Huwei et leur terre, offrant ainsi aux amateurs de rhum Favorland une saveur propre à Huwei.
Avec précaution, Cliff Cheng ouvre la dernière bouteille de rhum Favorland qui se trouve à la distillerie. En la versant, un parfum délicat de canne à sucre s’échappe des verres. Le rhum libère en bouche une douceur sucrée, évoquant l’abondante récolte de canne à sucre d’autrefois à Huwei, anciennement reconnue comme la capitale du sucre de Taïwan.
Article traduit de Taiwan Panorama écrit par Cindy Li
Retrouver l’article original en cliquant sur le lien suivant
📰 En savoir ➕ 📰
Pour #approfondir et #compléter votre lecture, nous vous recommandons de découvrir les articles suivants :
- ⏯ Sagesse alimentaire aborigène à Taïwan Lire l’article en cliquant sur le lien suivant.
- ⏯ Bar à Cocktails à Taipei Lire l’article en cliquant sur le lien suivant.
- ⏯ 5 idées de cocktails sans alcool Lire l’article en cliquant sur le lien suivant.
📱 Nos newsletters 📱
Abonnez-vous gratuitement à nos newsletters thématiques sur insidetaiwan.net pour des mises à jour régulières, des insights et une exploration approfondie de Taiwan, allant de sa culture à ses évolutions économiques et sociales.
- ⏯ Votre #Echo de Taïwan : Un aperçu de Taiwan, avec des anecdotes, des actualités, du vocabulaire, des faits culturels et bien plus pour tous les publics.
- ⏯ Newsletter #Economique : Des analyses approfondies sur les tendances, opportunités et défis économiques de Taiwan, un acteur clé mondial
- ⏯ Newsletter #Touristique : Des découvertes, des conseils, des activités, des astuces et des promotions pour explorer la diversité de Taïwan.
- ⏯ #Perspectives Taïwanaises : Explorez la société taïwanaise, mettant en lumière ses tendances, débats et transformations actuelles.
💞 Soutenez-nous 💞
- ⏯ Nous soutenir #financièrement
- ⏯ S’inscrire à nos #Newsletters
- ⏯ Nous suivre sur nos #réseaux sociaux
- ⏯ Devenir #partenaire
- ⏯ Proposer des #articles et du #contenu
- ⏯ Découvrir nos offres #professionnelles (Publicités, Conseils…)
Pour découvrir nos offres rendez-vous sur la page dédiée (Nous soutenir) ou contactez-nous pour collaborer avec nous.