Indémodables, les vélos demeurent un symbole intemporel. Présents sur le marché depuis plus de deux siècles, l’incorporation de la technologie des batteries et de l’intelligence artificielle a engendré une transformation révolutionnaire au sein de l’industrie cycliste. Et les vélos électriques sont en plein essor partout dans le monde… et Taïwan a su se positionner comme un des leaders mondiaux de l’industrie.
La récente pandémie a engendré une croissance inattendue au sein de l’industrie du vélo, contrairement à la décrue observée dans la plupart des secteurs économiques. Cette résilience met en lumière la capacité des bicyclettes à répondre à des besoins humains fondamentaux. À l’opposé de nombreuses industries traditionnelles qui fléchissent, le secteur cycliste prospère toujours. Plus spécifiquement, à l’heure où la quête d’émissions de carbone nettes nulles prévaut, les bicyclettes, émettant peu de pollution et de carbone, joueront un rôle prépondérant dans l’avenir des transports.
Optimiser le transport vert : les enjeux du dernier kilomètre
En l’année 2022, l’industrie de la bicyclette à Taïwan, depuis longtemps renommée comme le « royaume de la bicyclette », a atteint une valeur de production dépassant les 200 milliards de dollars taïwanais, ce qui la positionne au deuxième rang mondial en termes de valeur. Bien que le climat chaud, humide et pluvieux de Taïwan ne soit pas propice au développement d’une culture de la navette à vélo similaire à celle de l’Europe et du Japon, la puissante industrie du vélo a néanmoins réalisé d’incroyables avancées dans le domaine du partage de vélos publics.
Un exemple concret de cette avancée est illustré par l’événement majeur qu’est Velo-city Global, une conférence dédiée à la planification des infrastructures cyclables. Cette conférence est traditionnellement accueillie par une ville pionnière en matière de cyclisme et de politiques de transport durable. En 2016, cette conférence a été tenue à Taipei, marquant ainsi la première fois qu’elle se déroulait en Asie. Cette désignation témoigne de l’attention internationale portée au réseau taïwanais de vélos en libre-service YouBike, qui a été initié à Taipei en 2009.
À mesure que nous progressons vers des modes de vie axés sur des émissions de carbone réduites, les vélos sont de plus en plus considérés comme une solution pour résoudre le problème du « dernier kilomètre » dans les systèmes de transports verts, en permettant aux individus de se déplacer entre leur domicile et les infrastructures de transport en commun. Frank Su, directeur du service de vélos en libre-service YouBike, résume cette notion en expliquant que « les trains et les systèmes de transport en commun rapide peuvent être considérés comme les artères principales, les bus comme les petites artères, et les vélos publics comme les capillaires ». Cette observation met en lumière les rôles spécifiques que jouent les différents modes de transport dans cette dynamique.
YouBike à Taïwan : l’excellence dans le monde des vélos en libre-service
À Taïwan, le nom « YouBike » résonne comme l‘incarnation du vélo en libre-service. Cette éminence est attribuable à sa société mère, le groupe Giant, leader de l’industrie cycliste à Taïwan. Ce solide soutien a propulsé YouBike au rang des rares services de vélos en libre-service à opérer avec un système intégré englobant la conception, le développement, la fabrication et l’exploitation.
Frank Su, met en avant que la vision première de YouBike était de cultiver la culture du vélo et de permettre à chacun de savourer le plaisir des trajets courts à vélo tout en garantissant la sécurité. Du concept à la sélection des matériaux, YouBike n’a ménagé aucun effort. Chaque détail a été soigneusement pensé, des poignées de guidon ergonomiques qui se logent naturellement dans la main, à la sonnette intuitive à action rotative, aux trois vitesses disponibles, aux freins à tambour extrêmement fiables et à la béquille centrale robuste.
En ce qui concerne les composants majeurs des vélos, Taïwan regorge d’entreprises de renom fabriquant des produits de haute qualité. À titre d’exemple, les chaînes, dont la qualité surpasse de loin les chaînes standards, sont produites par KMC, leader mondial incontesté dans ce domaine. Les selles, mettant en avant l’ergonomie et la ventilation, sont exclusivement fabriquées par Velo, également fournisseur de sièges pour les automobiles Tesla. Quant aux pneus, conçus par le prestigieux fabricant Kenda, ils sont issus d’une formulation de caoutchouc et d’un processus de fabrication personnalisés, dotés d’une bande réfléchissante supplémentaire sur leurs flancs.
Le coût de production de chaque vélo YouBike 2.0, fruit de la collaboration entre les principaux acteurs de l’industrie cycliste taïwanaise, est substantiel. On peut sans exagération le qualifier de « Rolls Royce » du monde du vélo en libre-service.
L’essor du marché des vélos électriques
Les avancées technologiques ont profondément transformé l’industrie du cyclisme, avec l’émergence fulgurante des vélos à assistance électrique, communément désignés sous le nom de vélos électriques, qui puisent leur énergie dans l’électricité. Cette évolution a engendré un bouleversement majeur au sein de l’industrie.
Depuis l’année 2022, les ventes de vélos électriques ont surpassé celles des vélos traditionnels sur la scène internationale du cyclisme. Ils représentent désormais plus de 70 % du marché mondial des exportations de vélos taïwanais. Selon l’IEK Industrial Intelligence Network (IEKNet), une plateforme d’intelligence industrielle gérée par l’Industrial Technology Research Institute, il est prévu qu’en 2025, le nombre de vélos électriques exportés par Taïwan surpassera également celui des vélos traditionnels, témoignant ainsi de la croissance fulgurante de l’industrie des vélos électriques. « De nos jours, il est difficile de qualifier un vélo de vélo s’il n’est pas électrique », affirme Michael Lin, président de Pacific Cycles.
Pacific Cycles a été fondée en 1980 par le père de M. Lin, et ce dernier offre une perspective à long terme sur le marché. « Au cours des cinquante dernières années, le principal marché cible des vélos a été la génération du baby-boom d’après-guerre, habituée à la pratique du cyclisme. Cependant, cette cohorte de population vieillit aujourd’hui. » Les vélos électriques, qui offrent un niveau d’assistance adéquat aux cyclistes tout en convenant à la fois aux loisirs et à l’exercice, sont devenus le choix privilégié des personnes âgées à long terme, malgré leur coût supérieur à celui des vélos traditionnels.
À Taïwan, le cyclisme est avant tout perçu comme une activité récréative. Thompson Su, secrétaire général de la Taiwan Smart Electric Bicycle Association, note que bien que les cyclistes expérimentés ne plébiscitent pas forcément les vélos à assistance électrique en tant que premier choix, nombre d’entre eux ont, ces dernières années, fait l’acquisition de ces vélos pour leurs épouses et leurs enfants. « Ils peuvent ainsi enfin réaliser leur rêve de voyages à vélo en famille. »
De l’assistance, encore de l’assistance, toujours de l’assistance
Toutefois, tandis que les vélos traditionnels demeurent des produits purement mécaniques, la fabrication des vélos électriques intègre également les domaines de l’électrotechnique et de l’électronique, englobant les systèmes de commande électronique, la production de batteries et de moteurs, ainsi que la programmation.
Les principes sous-tendant la propulsion des vélos électriques ne sont pas intrinsèquement complexes à mettre en œuvre. La véritable complexité réside dans la détermination du moment opportun pour fournir une assistance électrique et dans la quantification de cette assistance. C’est là la principale distinction entre les vélos électriques et les scooters électriques. Michael Lin explique : « Malgré la similitude de l’énergie électrique comme source d’énergie pour les deux produits, leurs logiques de fonctionnement divergent radicalement. »
La conduite d’une moto électrique est relativement simple : l’accélération est contrôlée en tournant la poignée de l’accélérateur pour réguler la vitesse du véhicule. En revanche, les vélos électriques reposent sur le concept que la force motrice principale émane des pieds appuyant sur les pédales, tandis que l’énergie fournie par le système d’assistance électrique intelligent n’a qu’un rôle de complément.
La clé du fonctionnement des vélos électriques réside dans le concept d' »assistance ». Selon Thompson Su, un « bon vélo électrique » se caractérise par la fluidité de l’expérience du cycliste, indépendamment du moment où ce dernier accélère.
Cependant, comment atteindre cette fluidité sans intervention humaine ? Michael Lin expose le principe fondamental sous-jacent à l’assistance électrique : « Un vélo électrique nécessite au moins trois paramètres essentiels : la vitesse, le couple et le nombre de tours par minute. »
Chacun de ces paramètres revêt une signification spécifique pour un ordinateur. En cours de route, si le couple augmente brusquement tandis que la vitesse diminue, cela signale que le cycliste exerce une pression plus forte sur les pédales, ce qui entraîne un ralentissement du vélo. Cette variation peut résulter de la fatigue du cycliste ou de la montée d’une pente, mais quelle que soit la cause, une assistance électrique accrue peut être délivrée en conséquence. À l’inverse, si le couple diminue brusquement tandis que la vitesse augmente, cela peut indiquer que le vélo électrique descend en pente, auquel cas la puissance d’assistance électrique est réduite pour préserver la sécurité.
Cet aspect d' »ingénierie des facteurs humains » implique l’interprétation informatique du comportement humain et représente une expertise cruciale pour tous les acteurs évoluant dans le domaine des vélos électriques.
Les nouvelles perspectives des vélos électriques intelligents
En plus de soulager les cyclistes, les vélos intégrant l’intelligence artificielle (IA) ouvrent de nouvelles perspectives, redéfinissant ainsi la conception même des bicyclettes. Les vélos électriques haut de gamme, par exemple, offrent plusieurs modes d’utilisation, tels que « économie d’énergie », « normal » et « grande vitesse », permettant aux cyclistes de choisir le réglage en fonction de leurs besoins spécifiques. Ils ont ainsi la possibilité d’opter pour le mode « économie d’énergie » pour des défis plus exigeants ou d’adapter leur choix en fonction de l’autonomie de la batterie, optant pour le mode d’économie d’énergie pour préserver l’énergie dans les dernières étapes de leur trajet.
Michael Lin souligne : « Un vélo électrique n’intervient que lorsque nécessaire. Cette compréhension des facteurs humains constitue la principale distinction entre les vélos électriques et les motos électriques. »
De plus, Frank Su mentionne que « l’IA ne se limite pas seulement aux vélos eux-mêmes, mais peut également s’étendre à la gestion globale, notamment dans le cadre du partage de vélos ». La gestion des services publics de partage de vélos intègre l’internet des objets, le déploiement de flottes de vélos et la redistribution des vélos là où la demande est la plus forte. Les systèmes actuels se révèlent ainsi plus intelligents et plus efficaces que jamais. Par exemple, grâce à des tablettes électroniques équipant les camions de redistribution, les équipes peuvent accéder au système de gestion pour déterminer combien de vélos supplémentaires sont nécessaires à chaque station, planifier leur itinéraire de redistribution et suivre les vélos électriques pour garantir un remplacement de batterie opportun. De plus, grâce à l’exploitation des données massives (big data), les équipes de redistribution peuvent anticiper et acheminer les vélos vers des stations spécifiques en prévision des pics d’utilisation.
Il convient également de noter que, dans un avenir axé sur la réduction des émissions de carbone, il est essentiel de quantifier les émissions évitées par kilomètre parcouru à vélo. Cette évaluation repose sur les itinéraires, les distances et les temps enregistrés pour chaque vélo électrique.
L’avenir de l’industrie du vélo s’annonce plus prometteur que jamais. Michael Lin souligne, avec franchise et optimisme, que « saviez-vous que les bicyclettes n’ont même pas besoin de publicité ? ». Le potentiel commercial de ce produit ancien mais fondamental demeure incommensurable.
Indubitablement, la prochaine grande tendance sera l’essor du marché des vélos électriques intelligents. Bien que l’évolution du marché demeure imprévisible, une certitude demeure : Taïwan, grâce à son avantage concurrentiel dans les domaines des bicyclettes et de l’électronique, occupera une position de premier plan.
Article Original : Taiwan Panorama
Article Ecrit par Lynn Su
Traduit de l’anglais par Insidetaiwan.net
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