Avant d’être de grands classiques, ce ne sont que de simples plats. Nés dans un temple, dans une échoppe ou sur un quai de marché, chacun a traversé le temps, les frontières, les habitudes. Souvent venus d’ailleurs, parfois nés sur l’île, ces mets ont été adoptés, transformés, taïwanisés jusqu’à devenir incontournables. Aujourd’hui, difficile d’imaginer Taïwan sans un bol fumant de lu rou fan, sans une bouchée fondante de gâteau à l’ananas ou sans l’odeur entêtante du tofu puant dans les marchés nocturnes.
Dans cet article, on remonte le fil du temps. Pas de recettes ici, mais des histoires : celles qui se cachent derrière sept plats emblématiques, devenus aussi familiers que profondément taïwanais.
🍍 Gâteau à l’ananas (鳳梨酥)
Le gâteau à l’ananas est né de la rencontre entre les traditions pâtissières chinoises et l’identité taïwanaise moderne. Inspiré des gâteaux de lune ou des sucreries fourrées du Fujian, il a été adapté au contexte local dans les années 1930 sous l’influence de la pâtisserie japonaise pendant la colonisation. À cette époque, l’ananas, cultivé massivement à Taïwan pour l’exportation, devient un ingrédient facilement disponible. L’idée d’en faire une garniture sucrée émerge alors, d’abord pour les élites puis pour un public plus large.
C’est dans les années 1980 qu’il devient un souvenir typique (伴手禮, bàn shǒu lǐ) grâce aux industries agroalimentaires locales. Le nom même, 鳳梨 (ōng-lâi en hokkien), évoque la chance et la prospérité, ce qui en fait une douceur emblématique offerte lors des fêtes ou mariages.
🍜 Soupe de nouilles au bœuf (牛肉麵)
La soupe de nouilles au bœuf n’est pas une création taïwanaise mais un héritage des soldats nationalistes venus de Chine en 1949. Ceux-ci, fuyant la guerre civile, apportent avec eux leurs recettes régionales, notamment du Sichuan et du nord de la Chine. Ces vétérans, souvent sans emploi, ouvrent des petites échoppes pour vendre leurs plats familiaux – c’est là que la soupe de nouilles au bœuf, autrefois peu populaire, commence à se diffuser.
Adaptée aux goûts locaux et enrichie d’influences taïwanaises (bouillons plus doux, condiments lactofermentés), elle s’ancre dans la culture urbaine de Taipei à partir des années 1960. En 2005, un festival annuel est lancé dans la capitale, consacrant ce plat comme un véritable symbole culinaire national.
🍚 Lu Rou Fan (滷肉飯)
Plat humble aux racines chinoises anciennes, le lu rou fan aurait des origines remontant à la dynastie Zhou (1046–221 av. J.-C.), où la cuisson longue dans une sauce soja sucrée était déjà pratiquée. Il s’impose à Taïwan avec les premières vagues de migrants Han depuis le Fujian et le Guangdong à l’époque de la dynastie Qing (1644–1912).
Le plat s’intègre vite à la cuisine populaire, grâce à des ingrédients accessibles – porc haché, riz, sauce soja – et à une préparation nourrissante. Dès les années 1950, il devient un plat courant dans les cantines scolaires, les gares et les marchés. Il est aujourd’hui considéré comme l’un des plats les plus typiquement taïwanais, malgré son origine continentale.
🦪 Omelette aux huîtres (蚵仔煎)
L’omelette aux huîtres trouve son origine dans le sud de la Chine, notamment dans les régions Hokkien et Teochew. Ces communautés, venues à Taïwan dès le XVIIe siècle, importent avec elles cette recette simple à base de fruits de mer. En raison de l’abondance des huîtres sur les côtes occidentales de Taïwan, notamment à Tainan et Chiayi, le plat se popularise rapidement.
L’ajout de fécule de patate douce, typiquement taïwanais, donne à l’omelette sa texture élastique si caractéristique. C’est dans les marchés nocturnes du XXe siècle que ce plat devient une star du xiaochi (petite restauration), un classique apprécié pour son prix abordable et sa gourmandise.
🍲 Soupe aigre-piquante (酸辣湯, Suan La Tang)
Originaire de Chine du Nord, cette soupe date au moins de la dynastie Qing (1644–1912), où elle était réputée pour réchauffer l’organisme et stimuler l’appétit. Son introduction à Taïwan s’est faite progressivement avec les vagues migratoires du XXe siècle, notamment après 1949. Moins ancrée dans les habitudes populaires que d’autres soupes locales, elle reste associée aux restaurants de style « mainlander » (外省人), tenus par les familles issues du Kuomintang.
Avec le temps, elle a été adaptée : ajout de sang de porc, d’ingrédients locaux ou d’assaisonnements plus doux pour les palais taïwanais. Elle reste aujourd’hui très présente dans les buffets à volonté ou comme accompagnement dans les chaînes de restaurants chinois.
🧄 Tofu puant (臭豆腐)
Le tofu puant, bien qu’inventé selon la légende en Chine continentale au XVIIIe siècle, a connu à Taïwan un développement unique. Importé par les colons Han, il reste longtemps un mets marginal, apprécié dans certaines régions du centre. C’est dans les années 1950–60, avec l’essor des marchés de nuit, qu’il devient populaire dans sa version frite.
À Shenkeng, près de Taipei, les marchands locaux en font même leur spécialité. Grâce à une saumure adaptée au climat humide taïwanais et à une fermentation plus courte, les vendeurs créent un produit moins agressif mais plus croustillant, très apprécié des locaux. Taïwan est aujourd’hui le pays où le tofu puant a connu le plus de variantes (bouilli, frit, grillé).
🧅 Galette aux oignons verts (蔥油餅)
D’origine chinoise ancienne, la cong you bing fait partie des spécialités amenées à Taïwan par les migrants Han, notamment du Fujian. À la différence des crêpes françaises, cette galette est sans levure, faite de pâte étirée, roulée avec des oignons verts, puis poêlée dans l’huile. Simple et peu coûteuse, elle est rapidement adoptée comme collation dans les zones rurales et urbaines.
Son succès explose avec l’essor des marchés de rue à partir des années 1970. Certaines régions comme Yilan ou Hualien revendiquent même des recettes locales plus croustillantes ou épicées. Aujourd’hui, c’est un classique du petit-déjeuner taïwanais et une star de la street food.

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