L’idée d’un « État profond » gangrenant les institutions officielles s’est répandue à une vitesse alarmante ces dernières années, portée par des figures politiques, des influenceurs en ligne et des mouvements populistes. D’abord marginale, cette théorie conspirationniste s’est transformée en arme de délégitimation du pouvoir démocratique. De Washington à Taipei, en passant par Brasilia, elle menace l’équilibre institutionnel et la confiance des citoyens dans leurs États.
Une théorie conspirationniste aux multiples visages
Le concept d’« État profond » (ou deep state) suggère l’existence d’un réseau invisible de hauts fonctionnaires, militaires, magistrats ou agents du renseignement, œuvrant dans l’ombre pour contrôler les décisions politiques, indépendamment des élus. Cette théorie, sans base factuelle, présente les institutions comme corrompues et indéboulonnables, nourrissant une méfiance généralisée à l’égard des gouvernements démocratiques.
Elle a été popularisée aux États-Unis par Donald Trump, notamment pendant sa première présidence (2016-2020). Lorsqu’il fut confronté à des critiques de l’administration, à des enquêtes ou à des décisions judiciaires contraires à ses intérêts, il dénonça une cabale du « deep state ». Ce discours fut repris par des figures d’extrême droite, des chaînes comme Fox News, ou encore par des adeptes de QAnon, une mouvance conspirationniste affirmant que les élites mondiales sont liées à un réseau pédosataniste contrôlé par cet « État dans l’État ».
Au Brésil, Jair Bolsonaro a également adopté cette rhétorique. Lors des élections de 2022, il a accusé les institutions électorales – notamment le Tribunal supérieur électoral – de manipuler les résultats, insinuant une mainmise de l’État profond contre sa réélection. Ces accusations ont culminé avec l’assaut contre les institutions à Brasilia en janvier 2023, rappelant l’attaque du Capitole américain deux ans plus tôt.
En Turquie, Recep Tayyip Erdoğan a utilisé l’expression derin devlet pour évoquer une supposée coalition d’opposants internes à son pouvoir, souvent liés à l’ancien allié Fethullah Gülen. L’argument du complot interne lui a permis de purger la magistrature, l’armée et les universités après le coup d’État manqué de 2016.
Une arme de délégitimation du pouvoir démocratique
Ces discours ne visent pas seulement à mobiliser une base électorale. Ils permettent aussi de justifier l’autoritarisme, la concentration des pouvoirs exécutifs et l’affaiblissement des contre-pouvoirs. En assimilant toute critique ou enquête à une manœuvre de l’État profond, les dirigeants populistes remettent en cause le fonctionnement normal des institutions démocratiques.
Ce discours alimente aussi une fracture dans la société civile : il oppose un « peuple pur » à une élite soi-disant corrompue. Cela mine la cohésion sociale et la capacité de débat public, deux piliers essentiels de toute démocratie vivante. Les médias indépendants, les juges ou les chercheurs deviennent alors des cibles, accusés d’être au service de cette entité occulte.
En Europe, des partis comme le Rassemblement national en France ou Fidesz en Hongrie utilisent des variantes de ce récit pour dénoncer une bureaucratie bruxelloise toute-puissante, ou une prétendue ingérence de l’Union européenne dans les affaires nationales.
Taïwan aussi confronté à ce phénomène
À Taïwan, la théorie de l’État profond reste marginale mais gagne en visibilité, notamment à travers des discours pro-unification ou de désinformation en ligne, souvent soutenus par des opérations d’influence venues de Chine continentale. En 2020, des rumeurs propagées sur les réseaux sociaux affirmaient que le gouvernement de Tsai Ing-wen était infiltré par une élite non élue, accusée de manipuler les élections et d’imposer un agenda indépendantiste minoritaire.
Ces théories ont été alimentées par certains médias proches du Parti communiste chinois, ainsi que par des groupes politiques ultra-conservateurs ou liés à des intérêts économiques menacés par les politiques de transparence et d’anticorruption. La polarisation croissante à Taïwan entre les partisans de l’indépendance et ceux de la réunification alimente ce climat de défiance.
Les institutions démocratiques taïwanaises, réputées solides, restent vigilantes. La Commission électorale centrale, les médias de fact-checking comme MyGoPen ou Cofacts et les ONG comme DoubleThink Lab œuvrent pour contrer les campagnes de désinformation et renforcer l’éducation aux médias. Mais la tendance mondiale reste préoccupante.
🧠 Ce qu’il faut retenir
- 🔍 L’ »État profond » est une construction conspirationniste sans preuve qui déstabilise la confiance envers les institutions démocratiques.
- 📉 Des leaders populistes utilisent ce concept pour contourner les contre-pouvoirs, affaiblir les médias et se maintenir au pouvoir.
- 🌐 Cette théorie se diffuse à l’échelle mondiale, de l’Amérique aux démocraties émergentes, en passant par l’Europe.
- 🛡️ Taïwan reste vulnérable aux ingérences informationnelles mais continue de renforcer ses défenses démocratiques.

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