La négociation entre deux entreprises françaises présente déjà ses propres complexités, alors envisagez la situation dans un cadre franco-taïwanais. Négocier à travers les frontières ne s’improvise pas. Il est crucial d’ajuster son ton, son comportement et surtout de prendre en compte les nuances culturelles afin d’assurer une communication efficace et claire. Les entrepreneurs qui s’aventurent dans le monde des affaires à Taiwan l’ont souvent appris à leurs dépens.
La négociation interculturelle : qu’est-ce que c’est ?
La négociation interculturelle se réfère à l’art de dialoguer avec des individus issus de cultures diverses, souvent représentatives de pays différents. Dans notre monde de plus en plus globalisé, ces négociations traversent tous les secteurs d’activité, qu’il s’agisse de l’import-export, de l’industrie textile, des technologies émergentes ou de la logistique. Elles jouent un rôle crucial dans des stratégies telles que l’expansion internationale, l’élargissement d’une clientèle à l’étranger, ou encore la mise en œuvre de stratégies marketing à l’échelle mondiale.
Il est essentiel de reconnaître que la négociation interculturelle peut facilement conduire à des malentendus, voire à des offenses involontaires. Les perceptions et les attentes varient considérablement d’une culture à l’autre, en raison de traditions et de normes culturelles profondément enracinées. Un geste ou une attitude, qui peut sembler banale dans une culture, peut gravement compromettre le succès d’une négociation commerciale dans une autre.
Négociation interculturelle à Taïwan
Abordons maintenant le cas de Taiwan, une île à l’identité culturelle unique en Asie. À Taiwan, la communication en milieu d’affaires est également marquée par un profond respect et un sens de l’honneur. Comme dans d’autres parties de l’Asie, les Taïwanais valorisent le temps consacré à l’écoute, à la réflexion et à l’analyse. Il est courant pour eux d’attendre que l’interlocuteur finisse de parler, suivis d’un court silence avant de répondre, signifiant ainsi respect et intérêt.
Le respect de la hiérarchie est essentiel dans les négociations à Taiwan. Les décisions sont souvent prises au sommet et respectées par les échelons inférieurs. En ce qui concerne la communication non verbale, les Taïwanais, tout comme leurs voisins asiatiques, tendent à utiliser moins le langage corporel et les expressions faciales que les Occidentaux. Cependant, ils peuvent être légèrement plus expressifs que les Japonais ou les Coréens.
En termes de distance physique, une certaine proximité est maintenue, mais avec un respect de l’espace personnel, moins strict qu’au Japon par exemple. À Taiwan, il est également important de comprendre les subtilités de la communication indirecte, où les messages sont souvent transmis de manière nuancée et moins directe.
Attention au concept de « Face »
La notion de « Face », ou « Mianzi » en chinois, est un concept clé dans de nombreuses cultures asiatiques, notamment à Taiwan. Elle représente la dignité, le respect et le statut social d’une personne au sein de sa communauté. La Face peut être gagnée ou perdue à travers des actions et des interactions sociales. En milieu d’affaires, la préservation de la Face est cruciale ; une négociation réussie en Asie dépend souvent de la capacité à respecter et à augmenter la Face de toutes les parties impliquées.
Cela implique de traiter les autres avec respect, d’éviter les confrontations directes et de permettre à chacun de sauvegarder son honneur et sa réputation. Par exemple, une critique directe ou un désaccord public peut entraîner une perte de Face, tandis que montrer du respect et de la reconnaissance en public peut la rehausser. Comprendre et naviguer dans la dynamique complexe de la Face est donc essentiel pour établir des relations harmonieuses et réussir dans les interactions sociales et professionnelles en Asie.
Les règles d’or de la négociation interculturelle selon Erin Meyer
Dans un article paru dans la Harvard Business Review, Erin Meyer, professeur à l’INSEAD, a identifié 5 règles d’or pour négocier un contrat dans un contexte interculturel.
Adapter sa manière d’exprimer un désaccord
La première consiste à adapter votre manière d’exprimer un désaccord. Dans certains pays, il est normal d’être direct à partir du moment où le désaccord est exposé calmement et factuellement. Dans d’autres, le même comportement peut nuire aux échanges et conduire à l’arrêt de la collaboration.
Comprendre les émotions
Selon Erin Meyer, il faut également reconnaître ce que signifient les signes extérieurs d’émotion, et adapter votre réaction en fonction. Dans certaines cultures, il est par exemple normal d’élever la voix en cours de discussion, de rire ou de toucher son interlocuteur, tandis que dans d’autres, une telle attitude peut être ressentie comme intrusive, agressive, voire comme un manque de professionnalisme.
Apprendre comment se bâtit la confiance
La confiance peut se développer de façon cognitive ou affective. La première se fonde sur des faits et se développe donc au fil du déroulement de l’affaire. La seconde, la confiance affective, se construit sur des émotions. Dans des pays comme les Etats-Unis, on ne mélange jamais les deux catégories, alors que c’est exactement le contraire dans d’autres, d’où la nécessité de prendre le temps de comprendre les mécanismes de confiance de l’autre culture
Eviter les questions fermées
D’après Erin Meyer, les questions fermées, autrement celles auxquelles on répond par « oui » ou par « non » sont à éviter dans le cadre d’une négociation interculturelle. En effet, dans certaines cultures, dire « non » est tellement impoli qu’il est possible que votre interlocuteur dise « oui » alors même qu’il pense le contraire. De ce fait, mieux vaut laisser à l’autre partie l’opportunité de développer ses idées à l’aide de questions ouvertes.
Avancer prudemment vers le contrat
Enfin, si la notion de contrat écrit est inhérente aux cultures américaines et européennes, dans de nombreux pays, un accord verbal constitue un engagement formel. Il est donc mal venu de solliciter une confirmation écrite. Erin Meyer conseille de demander à vos interlocuteurs de vous envoyer les premiers une proposition de contrat ou simplement de revenir vers vous, afin que vous puissiez mieux comprendre ce qu’ils ont en tête.
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