Publié en 1976 par le Saint Sagesse Hall de Taichung, le livre 《地獄遊記》 (Voyage en Enfer) occupe une place singulière dans l’histoire de la littérature religieuse et de la bande dessinée taïwanaise. Présenté comme une œuvre de moralisation inspirée des écrits édifiants bouddhistes et taoïstes, il décrit le périple d’un médium guidé par Ji Gong dans les dix cours infernaux. L’ouvrage mêle prédication religieuse, narration fantastique et représentation graphique, puisqu’une adaptation en bande dessinée a suivi, à mi-chemin entre le traité spirituel et la littérature populaire illustrée. Cette hybridité en fait un objet unique, à analyser autant comme texte religieux que comme précédent dans l’histoire du neuvième art à Taïwan.
De la littérature de moralisation à la narration illustrée
L’auteur, Yang Zanru (plus tard connu sous le nom monastique Shenglun), affirme avoir rédigé ce récit par la pratique du fuji (扶乩), un rituel d’écriture automatique inspiré par les dieux. Le texte raconte comment son « alter ego » littéraire, Yang Sheng, voyage à travers les enfers en compagnie de Ji Gong. On y retrouve le motif traditionnel du voyage initiatique, très présent dans la littérature didactique asiatique (on pense au Yuli Baochao 玉歷寶鈔), mais transposé dans un univers narratif plus proche du roman d’édification que du texte canonique.
La version illustrée, dont le trait rappelle celui de Cai Zhizhong, marque un tournant : elle rend accessible au grand public une matière lourde de symbolisme et souvent effrayante. Les images accentuent la fonction pédagogique du texte : voir les damnés suppliciés par le fer, le feu ou les insectes, c’est apprendre par le choc visuel la nécessité de bien agir.
Une esthétique de l’Enfer entre tradition et modernité
Le contenu du Voyage en Enfer ne se limite pas à recycler des clichés bouddhistes ou taoïstes. Les descriptions évoquent une géographie infernale modernisée : les damnés subissent des peines liées à des fautes contemporaines (alcool au volant, crimes routiers), donnant aux supplices une dimension proche du quotidien des lecteurs des années 1970.
Dans l’adaptation graphique, chaque petit enfer (鼠啃, 毒蜂, 車訓…) devient une vignette saisissante, comparable aux estampes moralisatrices de l’époque Edo au Japon ou aux gravures européennes médiévales sur l’Enfer. Mais ici, le rythme séquentiel de la bande dessinée accentue l’effet de progression dramatique : on descend étape par étape, comme dans un véritable labyrinthe narratif. Cette construction séquentielle rapproche Voyage en Enfer des grands récits graphiques modernes, tout en gardant la fonction catéchétique des 善書 (shanshu).
Lecture critique : un précurseur pour la BD religieuse taïwanaise
L’intérêt de Voyage en Enfer dépasse la simple curiosité historique. En choisissant la bande dessinée comme médium, l’auteur et l’éditeur ont anticipé un mouvement encore marginal en 1976 : celui de l’usage du langage graphique pour transmettre un contenu religieux ou philosophique. Bien avant les expérimentations contemporaines autour de la BD spirituelle, cette œuvre taïwanaise propose une médiation entre tradition morale et culture populaire visuelle.
Pour la critique littéraire et graphique, Voyage en Enfer ouvre plusieurs pistes :
- la traduction visuelle du dogme religieux en images accessibles ;
- la construction d’une mythologie infernale locale, adaptée à la modernité taïwanaise ;
- la naissance d’un dialogue entre la bande dessinée didactique et les récits d’édification classiques.
Aujourd’hui, le texte et sa version dessinée témoignent de la capacité de la bande dessinée taïwanaise à investir des genres inattendus, à mi-chemin entre le conte édifiant, le récit fantastique et l’expérience spirituelle.
À retenir
- 📖 Voyage en Enfer (1976) est un shanshu taïwanais, mi-roman, mi-texte religieux.
- 🎨 Il a été adapté en bande dessinée, avec un style proche de Cai Zhizhong.
- 🔥 Le récit décrit les dix cours infernaux et leurs supplices, actualisés pour des fautes modernes.
- 👁️ L’image joue un rôle pédagogique et catéchétique, renforçant la fonction morale du texte.
- 🖋️ Cette œuvre constitue un jalon oublié dans l’histoire de la BD religieuse à Taïwan.

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