L’histoire de Maurice Benyovszky suscite des controverses depuis le XVIIIe siècle. Cet aventurier slovaque prétend avoir exploré la côte est de Taïwan sous la dynastie mandchoue. Son récit inclut des combats sanglants et des alliances surprenantes. Nous allons examiner les faits, les doutes et les motivations qui entourent son histoire.
Une arrivée incertaine
La figure de Maurice Benyovszky (莫里斯‧貝尼奧夫斯基) fascine les passionnés d’exploration, car il aurait posé le pied sur la côte est de Taïwan en 1771, avant tout autre Européen. Avant cette aventure, ce Slovaque avait participé à des soulèvements en Pologne. Son récit mentionne un débarquement après un passage sur l’île d’Amami-Oshima, dans l’archipel des Ryükyü, où l’équipage a échangé des marchandises. Selon ses mémoires, dix-huit hommes ont mis pied à terre pour demander de la nourriture, et des villageois leur ont offert du riz, du porc, des citrons et des oranges.
Les explorateurs ont ensuite essuyé des tirs de flèches qui ont entraîné une riposte fatale. Benyovszky rapporte un conflit meurtrier : six agresseurs seraient morts pendant ces échanges, puis soixante guerriers auraient à leur tour attaqué le groupe près du navire. Les compagnons de Benyovszky ont capturé cinq adversaires avant de revenir à bord. Cette mission s’est compliquée le lendemain, quand une plus grande expédition a massacré environ deux cents habitants et subi onze blessés dans les rangs européens. Des documents du XVIIIe siècle décrivent aussi une rencontre avec Don Hieronemo Pacheco (帕切科), un Espagnol qui vivait avec les autochtones depuis plusieurs années. Evidemment c’est un européen qui serait là sans avoir accoster sur l’île sinon Benyovszky n’aurait jamais pu être le 1er européen à accoster !!!!
Selon lui, la partie occidentale de l’île était sous domination chinoise, tandis que l’est demeurait aux mains de tribus aborigènes. Il a exhorté Benyovszky à envisager une conquête totale, convaincu que le gouvernement impérial ne pouvait imposer son autorité que sur un littoral restreint. Les récits soulignent la violence de ces affrontements, avec plus de mille morts et soixante captifs, même si les chiffres varient. Certains témoignages citent un chef local nommé Huapo (華婆) qui aurait considéré Benyovszky comme un libérateur. Il lui aurait alors offert de l’or, évalué à 10 000 NTD (295 euros). Benyovszky a pourtant choisi de quitter ce territoire pour revoir sa famille.
Des doutes persistants sur la véracité de son aventure
Plusieurs historiens remettent en question la véracité du récit de Maurice Benyovszky à Taïwan, car des incohérences numéraires et stratégiques émergent dans ses témoignages. L’explorateur évoque plus de mille adversaires tués et des foules immenses prêtes à l’accueillir, alors que la population de la côte est avoisinait probablement quelques milliers d’habitants seulement. Dans un ouvrage intitulé « Orientat Enlightenment: The Problematic Military Claims of Count Maurice Auguste Conte de Benyowsky in Formosa during 1771 », l’historien Ian Inkster souligne l’ampleur peu plausible des troupes engagées.
Benyovszky signale par exemple un rassemblement de 25 000 guerriers contre 12 000 ennemis, une évaluation qui contredit les estimations de l’époque. Les recherches de Père de Mailla (馬若瑟) en 1715 décrivent quant à elles des villages isolés et des résistances sporadiques, sans mentionner d’armées aussi considérables. D’autres documents notent que les Taïwanais utilisaient des bœufs pour compenser la rareté des chevaux, ce qui rend improbable la présence d’escouades équestres capables de soutenir des batailles prolongées.
Benyovszky affirme pourtant qu’un chef nommé Huaco (華哥) pouvait mobiliser des dizaines de cavaliers. Cette exagération alimente la thèse d’une mise en scène destinée à rehausser les exploits du comte. Des spécialistes estiment qu’il recherchait un financement européen pour mener à bien ses ambitions, et qu’il gonflait ses succès militaires à des fins de propagande personnelle.
Les archives locales ne mentionnent pas de conflit majeur à l’est de l’île en 1771, même si des incidents isolés ont pu se produire. Des chercheurs polonais ont mis en doute ces allégations. Le caractère sensationnel de ce récit, ponctué d’exactions et de prodiges, suscite un scepticisme grandissant. Les témoignages manquent de sources croisées, et la dimension géopolitique de l’époque, avec la présence limitée de l’administration chinoise loin des ports principaux, ne cadre pas avec la conquête éclair que Benyovszky prétend avoir menée.

Entre mythe et réalité
Les dernières étapes du périple de Maurice Benyovszky prolongent cette tension entre faits attestés et légendes. Après son passage à Taïwan, il aurait navigué vers d’autres contrées asiatiques avant de retourner en Europe, où il publia ses mémoires. Certains biographes rapportent qu’il séjourna ensuite à Madagascar, dans l’intention de fonder une colonie. Cette ambition illustre l’esprit aventureux du comte, prêt à multiplier les expéditions pour consolider sa réputation. Selon plusieurs sources, Benyovszky n’a jamais renié la version dramatique de sa venue à Taïwan, même si des témoins jugeaient son récit partiellement inventé.
Il décrivait la côte orientale comme un territoire libre, car le gouvernement mandchou se focalisait surtout sur la façade occidentale, plus proche de la Chine continentale. Les aborigènes de cette région, parmi lesquels on compte les Amis (阿美族) et les Puyuma (卑南族), conservaient en grande partie leur organisation sociale traditionnelle. Benyovszky affirmait qu’ils lui avaient confié un rôle de chef providentiel, convaincus que son armement européen leur offrirait un avantage décisif contre les milices sino-taïwanaises. Son choix de quitter l’île reflétait pourtant une priorité familiale: il désirait revoir sa femme et son fils.
Certains chroniqueurs y voient la preuve qu’il ne nourrissait pas de rêve de conquête durable, tandis que d’autres y discernent une simple stratégie pour attirer de nouveaux partenaires financiers. De fait, plusieurs lettres adressées à des mécènes français ou autrichiens font l’éloge de sa maîtrise militaire, sans mentionner de doutes ou de remords. Cette divergence de points de vue s’alimente encore aujourd’hui, car l’histoire de Benyovszky demeure un exemple frappant d’ambition, de contradiction et de propagation d’épopées. Ces récits en parties inventés étaient très courants à l’époque des grands découvreurs.
Les historiens modernes tentent d’analyser ces archives avec prudence, conscients que le légendaire entoure souvent les voyageurs qui défient le pouvoir établi et franchissent des frontières inexplorées. Il mourut en 1786, d’un ultime coup du destin qui amplifia sa légende.
📌 Ce qu’il faut retenir
🐉 Maurice Benyovszky provenait de Slovaquie et se disait premier Européen à fouler l’est de Taïwan
⚔️ Les récits parlent de batailles féroces avec plus de 1 000 morts, mais leur exactitude reste contestée
🔎 Les chiffres exagérés et l’absence de sources suscitent un scepticisme croissant
💰 Le chef Huapo (華婆) aurait offert de l’or (10 000 NTD, soit 295 euros) pour retenir Benyovszky sur l’île
📰 En savoir ➕ 📰
Pour #approfondir et #compléter votre lecture, nous vous recommandons de découvrir les articles suivants :
- ⏯ Le français Georges Psalmanazar et son récit inventée de Taïwan Lire l’article en cliquant sur le lien suivant.
- ⏯ Les 12 gouverneurs hollandais de Taïwan Lire l’article en cliquant sur le lien suivant.
- ⏯ Fernao Mendez Pinto, et le nom de Formose Lire l’article en cliquant sur le lien suivant.
💞 Soutenez-nous 💞
- ⏯ Nous soutenir #financièrement
- ⏯ S’inscrire à nos #Newsletters
- ⏯ Nous suivre sur nos #réseaux sociaux
- ⏯ Devenir #partenaire
- ⏯ Proposer des #articles et du #contenu
- ⏯ Découvrir nos offres #professionnelles (Publicités, Conseils…)
Pour découvrir nos offres rendez-vous sur la page dédiée (Nous soutenir) ou contactez-nous pour collaborer avec nous.
