Traverser Taïwan à pieds par les montagnes : l’exploit de Julian et Florian

Traverser Taïwan à pieds et par les montagnes : l’exploit de Julian et Florian, une aventure inédite et inspirante
40 000 pas par jour - Copyright : Julian Sandbrink

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Il y a quelques mois, Julian et Florian ont entrepris un périple qui n’avait encore jamais été tenté. L’idée des deux randonneurs était de traverser l’île du nord au sud en passant par ses chaînes montagneuses. Bien que de nombreux sportifs fassent le tour de l’île à pied ou à vélo, cet itinéraire inédit a créé une vague de réactions variées dans la communauté outdoor locale. C’est en seulement quelques semaines et avec une planification énorme qu’est né le challenge de la Trans-Taïwan.

Aujourd’hui, nous donnons la parole à Julian qui nous parle de cette aventure inédite dans les détails.

Julian et Florian – Copyright : Julian Sandbrink

Bonjour Julian, peux-tu te présenter en quelques mots ?

Je suis Julian, originaire d’Allemagne, voyageur à plein temps depuis 2 ans. J’explore les lieux sauvages.

Pourquoi et comment as-tu décidé de venir randonner à Taïwan alors qu’il y a tellement de long treks plus célèbres et établis dans le reste du monde ?

À la base, je ne suis pas venu pour randonner à Taïwan : je suis venu explorer l’île, puis j’ai fini par randonner.

Mon ami Flo m’a convaincu de me rendre à Taïwan car son père, journaliste de voyage, adorait ce pays. Nous voulions tous les deux faire autant de randonnées que possible. Après avoir réfléchi à différents projets en montagne, j’ai réalisé que nous pourrions tout aussi bien traverser tout le pays à pied. Flo a immédiatement dit oui, même s’il savait qu’il devrait partir après la première moitié du trek. Il avait déjà réservé un vol pour la Malaisie afin de voir son frère. Il est certainement beaucoup plus facile de suivre les itinéraires de randonnée établis, mais il est beaucoup plus intéressant d’explorer son propre itinéraire et de traverser un pays entier !

Peux-tu m’en dire plus sur votre projet Trans-Taïwan ?

Au départ, nous n’avions que trois lieux de passage obligés : le point le plus au sud, le plus au nord et le point le plus haut de Taïwan (Mt Yushan 3952m). Le reste était entièrement modifiable. Lorsque nous avons partagé le projet d’itinéraire initial avec les randonneurs locaux, nous avons appris que cette traversée serait un véritable exploit. Personne ne l’avait entreprise auparavant !

Comment ce projet a-t-il été accueilli par les locaux et les résidents étrangers ?

Les premiers commentaires que nous avons reçus sur notre idée provenaient principalement d’expatriés et étaient plutôt négatifs. Ils nous avertissaient du pire. « Impossible, trop dangereux, vous mourrez à cause de X, pas possible en hiver, trop peu de temps pour planifier, vous n’avez jamais été à Taïwan et la randonnée ici est complètement différente de tous les autres pays du monde, vous ne parlez pas chinois, vous n’obtiendrez jamais les permis en si peu de temps… ».

En même temps, nous avons reçu des conseils précieux lorsque nous avons posé des questions plus détaillées et que les gens ont réalisé que nous étions vraiment sérieux. Ils ont alors commencé à nous téléphoner, ont écrit des messages longs et détaillés et nous ont envoyé de nombreuses suggestions.

Quel a été le plus grand défi dans l’organisation de cette randonnée ? Comment s’est déroulée votre expérience avec le système de permis des parcs nationaux ?

C’était une idée très spontanée et nous avons commencé à planifier seulement 1 à 2 semaines avant d’arriver à Taïwan. D’où le tollé, tout le monde pensant que nous n’obtiendrions pas nos permis à temps.

Cependant, une femme merveilleuse à la hotline du parc national de Yushan parlant couramment l’anglais nous a aidés à tout gérer. En l’espace de 24 heures, nous avons obtenu notre permis pour traverser le parc national de Yushan par la section sud 2 et pour gravir le pic de Yushan. Il se trouve que personne ne veut camper en haute altitude en janvier et en semaine, ce qui a facilité d’obtention des permis.

Au sommet de Yushan – Copyright : Julian Sandbrink

Dans l’ensemble, j’ai trouvé que le système de permis était tout à fait navigable. Oui, c’est un peu difficile, mais c’est le prix à payer pour pouvoir faire des randonnées sans guides – ce qui n’est presque plus possible ailleurs en Asie !

En dehors des permis, nous devions constamment adapter notre itinéraire et nous ne savions généralement pas où nous allions dormir avant la fin de l’après-midi. Mais ce n’était pas un problème, car dans un pays sûr comme Taïwan, il est possible de dormir presque n’importe où. J’ai parfois même dormi dans des parcs publics, me réveillant lorsque les personnes âgées commençaient à courir autour de ma tente à 5h30 du matin en me saluant joyeusement.

Quels sont vos meilleurs (et vos pires) souvenirs sur les sentiers ? Quels sont les défis que vous avez rencontrés ?

J’ai adoré être surpris chaque jour, que ce soit par des gens extraordinaires ou par la nature. Je serai toujours reconnaissant de la gentillesse authentique que j’ai pu rencontrer. En ce qui concerne la nature taïwanaise, je dois avouer que j’avais peu de connaissances et aucune attente à ce sujet. Par conséquent, j’ai été fasciné par les paysages en constante évolution. En l’espace de deux jours, nous avons connu les quatre saisons. Nous sommes passés du chaud au froid (et aux sources chaudes naturelles !), et des palmiers aux pics rocheux.

Sur la route – Copyright : Julian Sandbrink

Mes pires souvenirs sont les ampoules que j’ai eu sous la plante des pieds le deuxième jour, car je n’ai pu acheter des chaussures de randonnée que deux jours avant le départ. Chaque pas me faisait mal et nous faisions environ 40 000 pas par jour. Après plusieurs jours de marche, j’ai décidé qu’il fallait que je me repose avant d’entrer dans le parc national de Yushan. Comme il n’est pas possible de changer les dates d’un permis, il a fallu rattraper le temps perdu, ce qui signifiait marcher en moyenne plus de 25 km par jour pendant une semaine et demie.

J’ai adoré être surpris chaque jour, que ce soit par des gens extraordinaires ou par la nature

Julian

Si c’était à refaire, que feriez-vous différemment ?

Commencer à planifier plus tôt et venir un peu plus tard dans l’année, afin de pouvoir prendre plus le temps pour traverser les montagnes. Nous avons commencé le 5 janvier et avons parfois eu des températures très froides. Ce n’était pas vraiment un problème en soi, mais l’équipement d’hiver alourdit le sac.

J’espère que certaines personnes se sentiront inspirées et auront des projets similaires en créant des itinéraires « Trans-Taïwan » qui empruntent davantage de sentiers de randonnée.

Je sais que vous avez reçu beaucoup d’aide sur le sentier. Peux-tu m’en dire plus à ce sujet ?

Une fois sur la route, nous avons bénéficié du plus grand soutien possible. Les Taïwanais ont adoré l’idée que deux étrangers traversent leur pays à pied. Nous avons été invités chez des gens et avons reçu de la nourriture gratuite presque tous les jours, parfois plus que ce que nous pouvions porter.

Des rencontres de tous types – Copyright : Julian Sandbrink

Vers la fin, je recevais une orange quasi-quotidiennement. Un homme m’a même lancé une banane par la fenêtre de sa voiture sur a route menant à Hehuanshan. D’autres nous ont aidés en envoyant des vivres dans les parcs nationaux ou en faisant livrer du matériel dans des magasins 7/11 pour que nous puissions le récupérer en cours de route. Nous avions une poignée de personnes extrêmement compétentes qui répondaient aux questions sur les itinéraires en quelques minutes. Après avoir voyagé en Asie pendant près de deux ans, je dirais que les Taïwanais ont atteint un autre niveau de convivialité et d’hospitalité.

Parlons matériel : je sais que cela ne vous dérange pas de porter un sac lourd ! Quels sont vos trois “articles de luxe” préférés ? Y a-t-il un article que vous regrettez de ne pas avoir emporté ? Et certains articles que vous avez fini par abandonner à un moment donné ?

Nous sommes arrivés à Taïwan avec environ 60 % du matériel nécessaire, car nous étions tous deux voyageurs de longue date. De plus, notre équipement devait être adapté à une grande variété d’environnements et températures. Mon sac de couchage convenait à une température de +3°C, mais dans le parc national de Yushan, il faisait probablement -6°C. J’ai passé quelques nuits froides et sans sommeil, mais au final, j’aurais quand même choisi le même sac de couchage. Plus tard, j’ai eu des températures plus chaudes, ce qui compensait.

Itinéraire – Copyright : Julian Sandbrink

Articles de luxe

  1. Une doudoune à se partager à deux : après que tout le monde nous ait fait peur en répétant que les montagnes de Taïwan étaient froides, Flo et moi avons décidé d’acheter une doudoune. Mais, comme nous ne voulions pas non plus porter trop de choses, nous n’en avons acheté qu’une seule et avons décidé que celui qui aurait le plus froid l’utiliserait. En fin de compte, c’était un bon oreiller, rien de plus.
  2. Deux kilos de pommes à sucre. Nous avons souvent reçu tellement de nourriture de la part des Taïwanais que nous ne pouvions pas la finir ou même la transporter. Lorsque nous avons traversé une plantation de pommes à sucre, nous voulions en acheter une, pour goûter. La dame a insisté pour nous en donner un grand sac, ce que nous n’avons bien sûr pas pu refuser. Nou avons dû les porter jusqu’à ce que’elles soient assez mûres pour les manger.

Objets inutilisés mais utiles

Il y a des objets que je n’ai jamais utilisés, mais je suis quand même content de les avoir emportés. Les crampons ou la trousse de premiers secours, par exemple.

Qu’est-ce qui vous a surpris dans la communauté outdoor ici à Taïwan ?

L’activité et le soutien dont elle fait preuve ! Je pense que notre premier message dans ces groupes de randonnée sur Facebook a été l’un des plus commentés dans les 24 heures. Dans la plupart des pays d’Asie du Sud-Est, il est difficile de faire de la randonnée car il n’y a pas de randonneurs, pas de sentiers, pas d’informations et souvent des règles qui rendent la présence d’un guide obligatoire.

De nombreux Occidentaux qui ont fait de la randonnée dans leur propre pays disent que la randonnée à Taïwan est très différente, voire plus difficile. Êtes-vous d’accord ? Si oui, à quel niveau ?

Je suis d’accord pour dire que c’est très différent, mais d’une manière positive. Les paysages de Taïwan sont uniques et absolument magnifiques ! Auparavant, nous n’avions jamais marché sur une crête au-dessus d’une mer de nuages pendant plusieurs jours. De plus,on y trouve des arbres même à haute altitude : il y a donc une flore et une faune très développée. Presque toutes les montagnes sont abruptes, et j’adore monter rapidement. J’aime encore plus me détendre dans des sources chaudes naturelles au milieu des montagnes, en pleine nuit !

Mer de nuage et montagnes – Copyright : Julian Sandbrink

Il est possible de faire des randonnées difficiles dans presque tous les pays. Taïwan a été suffisamment explorée pour que l’on y trouve de nombreux sentiers difficiles mais bien établis. Beaucoup dépend des conditions, qui sont peut-être plus souvent défavorables à Taïwan que dans d’autres régions. J’ai fait de la randonnée dans de nombreux pays et pour moi, les sentiers (peu nombreux) que j’ai parcourus à Taïwan n’étaient que du plaisir.

Quel a été votre repas ou votre recette préférée durant votre périple ?

Tout ce qui va au-delà des flocons d’avoine dans de l’eau froide est un luxe. Dans les montagnes, nous avons mangé des repas déshydratés et des soupes de nouilles instantanées. En dehors des parcs nationaux, nous avons généralement mangé dans des petits restaurants ou des 7/11. Cuisiner aurait pris trop de temps car nous devions souvent marcher jusqu’à la tombée de la nuit et nous voulions juste dormir au plus vite.

Reviendriez-vous randonner à Taïwan ? Si oui, quels sont les sentiers que vous aimeriez explorer et avez-vous un nouveau projet en tête ?

Il ne fait aucun doute que je reviendrai ! Je n’ai fait qu’effleurer la beauté de Taïwan et je sais maintenant qu’il y a tant d’autres endroits magnifiques à explorer. Mon projet serait de faire les 100 Baiyue en 100 jours, sans utiliser de véhicule motorisé entre chaque étape. Mais cela nécessiterait beaucoup d’organisation et des sponsors.

Mon projet serait de faire les 100 Baiyue en 100 jours, sans utiliser de véhicule motorisé entre chaque étape.

Julian

Y a-t-il quelque chose que vous aimeriez partager avec nos lecteurs ?

Vivez une vie pleine et sans regrets. Marcher à travers Taïwan m’a fait réaliser qu’il était possible pour une société d’être aidante et bienveillante, ce qui donne une vision pleine d’espoir. J’espère que je pourrai répandre un peu de cette gentillesse dans d’autres endroits où je me rendrai. Merci encore aux centaines de personnes qui nous ont aidés !

Quels sont vos trois endroits préférés à Taïwan, en dehors des sentiers ?

Tout d’abord, j’ai essayé de m’éloigner le moins possible des sentiers. Une fois, nous avons planté la tente quasiment dans une rue adjacente à un sentier.

Mes trois endroits préférés sont les suivants : Lisong Hot Springs, Wenshan Hot Springs et Jiaoxi Public Hot Springs. Je doute que mes muscles auraient pu continuer à fonctionner sans toutes les sources chaudes rencontrées le long du chemin.

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À propos de l'auteur

  • Anaïs

    Anaïs Denquin a passé les 5 dernières années à explorer les montagnes et rivières de Taïwan. Membre active pour la protection environnementale, elle organise des évènements de sensibilisation et des cleanups afin de préserver l’île et son écosystème.

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2 réflexions au sujet de “Traverser Taïwan à pieds par les montagnes : l’exploit de Julian et Florian”

  1. Bonsoir,
    Nous venons de prendre nos billets d’avion pour 2 mois à Taïwan mais nous nous arrachons les cheveux avec les permis montagne, pourriez-vous nous aider à trouver un itinéraire de trek ?

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