L’article du Qiao Collective, « Taiwan: An Anti-Imperialist Perspective », publié dans sa Monthly Review, se concentre largement sur l’histoire prémoderne, omettant largement la perspective des Taïwanais. Cette approche surprend, venant d’une publication qui se veut anti-impérialiste. L’article de Qiao utilise principalement l’histoire des empires prémodernes pour justifier les revendications géopolitiques d’un empire contemporain, ce qui soulève des questions sur la validité historique de telles affirmations. En effet, pour une histoire censée être anti-impérialiste, Qiao s’appuie surtout sur l’histoire des empires prémodernes pour justifier les revendications géopolitiques d’un empire contemporain.
Ainsi, l’histoire de Qiao commence en 1895 en affirmant que « la séparation de Taïwan du continent chinois a commencé en 1895, lorsque le gouvernement Qing a été contraint de céder Taïwan au Japon après sa défaite lors de la première guerre sino-japonaise ». Cela paraît absurde pour une publication qui a autrefois accueilli les débats de Brenner, dont la leçon était de montrer l’erreur de projeter ahistoriquement la « nation » comme une catégorie rétroactive dans le temps.
Justifications historiques discutables
Qiao commence son analyse historique en 1895, affirmant que « la séparation de Taïwan du continent chinois a commencé en 1895, lorsque le gouvernement Qing a été contraint de céder Taïwan au Japon après sa défaite lors de la première guerre sino-japonaise ». Cependant, cette interprétation néglige la complexité des revendications historiques, puisque Taïwan n’a été intégrée comme province que pendant sept ans sous les Qing et était considérée comme un arrière-pays obscur et sans importance par les dynasties chinoises prémodernes.
La question se pose alors de savoir pourquoi Qiao pense que la République populaire de Chine (RPC), issue des forces politiques ayant renversé la Chine dynastique, devrait hériter des revendications prémodernes de l’empire Qing. Cette perspective soulève également la question de la pertinence de l’héritage des revendications impériales prémodernes dans un contexte contemporain. En effet, Taïwan n’a été intégrée à l’empire Qing qu’à la fin du XIXe siècle et seulement pour une brève période. La justification de Qiao omet de reconnaître que Taïwan a longtemps été perçue comme une région périphérique et insignifiante par les dynasties chinoises. Cette interprétation simpliste des faits historiques soulève des questions sur l’objectivité de l’analyse de Qiao.
Le nationalisme culturel de Qiao
Qiao ne parvient pas à expliquer pourquoi la colonisation des Han à Taïwan, une forme de colonialisme de peuplement, a eu lieu. Bien que l’article mentionne des figures historiques comme Zheng Chenggong (Koxinga), il omet de discuter de son héritage complexe, y compris son lien avec le Japon. De plus, Qiao ignore largement les voix contemporaines des peuples autochtones de Taïwan et utilise leur histoire comme un accessoire pour justifier les revendications impériales chinoises.
Cette approche masque les véritables dynamiques de colonisation et de résistance autochtone à Taïwan. L’article omet également de discuter de l’impact de la colonisation japonaise et de l’autoritarisme du Kuomintang (KMT) sur la formation de l’identité taïwanaise contemporaine. Les luttes des Taïwanais contre ces régimes et leur quête d’indépendance et de démocratie sont négligées au profit d’une vision nationaliste chinoise. Cette omission des dynamiques internes et des résistances locales fausse la compréhension complète de l’histoire de Taïwan.
Une perspective contemporaine manquante
Dans la dernière partie de l’article, Qiao se tourne vers la politique contemporaine de Taïwan, mais évite de confronter les réalités actuelles. L’article se concentre sur les présidences de Lee Teng-hui et Chen Shui-bian, tout en omettant largement la présidence de Ma Ying-jeou, pourtant marquée par un engagement élevé entre les deux rives du détroit. Cette omission révèle une hésitation à aborder les réalités actuelles de la démocratie taïwanaise et les tendances identitaires locales, préférant une perspective historique idéalisée et nationaliste.
En négligeant de discuter de la dynamique politique actuelle, Qiao passe à côté des éléments clés qui définissent l’identité taïwanaise contemporaine. Par exemple, les mouvements sociaux récents tels que le Mouvement des Tournesols, qui a joué un rôle crucial dans la résistance contre l’influence chinoise, ne sont pas abordés. Cette omission montre une réticence à reconnaître les évolutions récentes qui ont façonné la société taïwanaise et son identité distincte.
Points à retenir :
- 📜 Historique prémoderne : Utilisation de l’histoire des empires prémodernes pour justifier les revendications contemporaines
- 🗺 Revendiquer le passé : Néglige les voix autochtones et les dynamiques coloniales
- 📅 Omissions contemporaines : Évite les réalités actuelles de la politique taïwanaise et les tendances identitaires locales
- 🌏 Nationalisme culturel : Perspective nationaliste chinoise masquant les dynamiques historiques réelles
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