Taïwan exploite aujourd’hui la deuxième plus grande flotte mondiale de pêche hauturière, avec environ 1 100 navires opérant dans les eaux internationales. Cette réussite économique repose cependant sur une réalité sociale documentée de longue date par les organisations de défense des droits humains : l’exploitation structurelle des travailleurs migrants, en grande majorité originaires d’Asie du Sud-Est, exclus du champ d’application du droit du travail taïwanais.
Le Navire You Fu
Le cas du navire You Fu illustre avec une rare clarté ces dérives systémiques. Pendant plus de quinze mois, des marins indonésiens ont travaillé dans des conditions assimilables au travail forcé, cumulant des journées de travail excessives, une privation prolongée de repos, une alimentation insuffisante et une absence totale de rémunération. Isolés en mer, privés de moyens de communication et de leurs documents d’identité, ils se sont trouvés dans une situation de dépendance totale vis-à-vis de l’armateur et des intermédiaires.
Lorsque ces travailleurs ont finalement pu débarquer et réclamer leurs salaires, des tentatives de règlement partiel conditionné à un nouvel engagement en mer leur ont été proposées. Le paiement intégral n’est intervenu qu’après une médiatisation publique du dossier à Taipei, révélant une gestion réactive plutôt que préventive de ce type d’abus par les autorités concernées.
Une réalité connue et documentée
Pour les organisations de défense des droits humains, ce dossier ne constitue pas une exception. Depuis des décennies, les enquêtes révèlent des schémas récurrents d’exploitation dans la pêche hauturière : salaires retenus, contrats trompeurs, confiscation de passeports, repos insuffisant et violence psychologique ou physique. Des affaires antérieures, déjà largement médiatisées, avaient suscité une indignation publique sans déboucher sur des réformes structurelles durables.
Le rapport Silenced Voices, fruit d’une collaboration entre organisations taïwanaises et japonaises, retrace l’ensemble de la chaîne d’exploitation, depuis le recrutement dans les villages d’origine jusqu’aux ports taïwanais et aux zones de pêche du Pacifique. Les témoignages recueillis correspondent aux principaux indicateurs de travail forcé définis par l’Organisation internationale du travail, confirmant le caractère systémique de ces pratiques.
Vulnérabilité syndicale et obstacles à l’organisation collective
La situation des pêcheurs migrants est aggravée par la fragilité de leurs structures de représentation. Les tentatives d’organisation syndicale se heurtent régulièrement à des résistances économiques et administratives. L’exemple du syndicat de pêcheurs migrants indonésiens basé à Donggang illustre ces difficultés : né d’une initiative communautaire, il a progressivement évolué vers une structure de défense des droits du travail, avant de faire face à des tentatives d’ingérence visant à limiter son autonomie.
Ce type de pression reflète un déséquilibre profond des rapports de force dans le secteur, où les travailleurs migrants disposent de peu de leviers pour faire valoir leurs droits, en particulier lorsqu’ils opèrent loin du territoire taïwanais.
Un système juridique à deux vitesses
Au cœur du problème se trouve un cadre réglementaire différencié. Les pêcheurs recrutés à l’étranger relèvent d’un régime distinct, administré par l’Agence des pêches, et ne bénéficient pas des protections prévues par le droit du travail général. Leurs contrats, signés hors du territoire, échappent aux garanties fondamentales applicables aux travailleurs employés à terre.
Ce système à deux niveaux a fait l’objet de critiques répétées, tant à Taïwan qu’à l’international. Il se traduit concrètement par des écarts de rémunération significatifs, une absence de normes claires sur le temps de repos et des mécanismes de recours largement inefficaces. Malgré une revalorisation officielle du salaire minimum des pêcheurs migrants hauturiers, les pratiques observées demeurent très éloignées des standards appliqués aux autres travailleurs.
Pressions internationales et réformes limitées
Les avancées réglementaires enregistrées ces dernières années résultent principalement de pressions extérieures, notamment européennes et américaines. Si certaines mesures de contrôle ont été renforcées, les observateurs soulignent leur portée limitée face aux causes profondes de l’exploitation, en particulier la pratique du transbordement en mer, qui maintient une partie de la chaîne d’approvisionnement hors de tout contrôle effectif.
Parallèlement, le coût humain reste élevé. Les décès et blessures de travailleurs migrants à bord de navires taïwanais continuent d’être signalés à un rythme préoccupant, sans que ces drames ne se traduisent par une mobilisation politique à la hauteur des enjeux.
Un enjeu structurel et global
Le cas du You Fu met en lumière une réalité qui dépasse le cadre d’un seul navire ou d’un seul pays. Il révèle une responsabilité partagée, impliquant autorités publiques, acteurs économiques et chaînes d’approvisionnement internationales. Tant que le système juridique différencié perdurera, les organisations de défense des droits humains estiment que les abus continueront.
Pour les anciens membres d’équipage concernés, la reconnaissance de leur situation comme relevant de la traite des êtres humains ouvre un accès temporaire à la protection et au travail à Taïwan, sans garantir une réparation complète. Leur parcours rappelle que derrière les produits de la pêche consommés à l’échelle mondiale se cachent des réalités sociales invisibilisées, dont la prise en compte reste un défi majeur pour Taïwan.
🧾 L’essentiel à retenir
- ⚓ Une industrie stratégique, mais marquée par des abus structurels
- 🧑🏭 Des travailleurs migrants exclus du droit du travail général
- 📄 Un système juridique à deux vitesses, source majeure d’exploitation
- 🌍 Des réformes surtout dictées par la pression internationale
- ⚠️ Un coût humain élevé, encore largement sous-reconnu
Cet article est une traduction réalisée par notre rédaction d’un article de Antonio Prokscha publié dans New Bloom Magazine

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